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Parti Socialiste

ÉLECTION PRÉSIDENTIELLE 2022 : Les propositions des hôpitaux et cliniques privés à missions

Questions à Anne Hidalgo

Parti Socialiste

QUESTION 1 : Si vous êtes élue/élu, pouvez-vous nous exposer les trois à cinq grandes priorités de votre politique de santé, et les raisons fondamentales qui motiveront ce choix ? Et quelles seraient les trois à cinq actions phares du début de votre quinquennat ?

J’engagerai dès le début du quinquennat des mesures d’urgence pour lutter contre les déserts médicaux et réparer notre système de santé.

1. Je ferai de la quatrième année d’internat de médecine générale, initiée par le gouvernement, une véritable année de professionnalisation lors de laquelle ces médecins en fin de formation exerceront dans les déserts médicaux. Dès 2023, ce sont ainsi 4 000 médecins qui exerceront dans ces territoires, soit une offre de soins accessible immédiatement pour 3 millions de Français.
2. Je débloquerai des moyens en urgence pour l’hôpital, fragilisé par la pandémie. Sous mon quinquennat, ce seront chaque année 4 milliards d’euros par an de plus que je flécherai vers les hôpitaux.
3. Pour sortir définitivement de l’épidémie de Covid-19, j’agirai au niveau international pour la levée temporaire des brevets sur les vaccins et favoriser leur production dans les pays en voie de développement.

De façon plus structurelle, je propose de changer de perspective concernant les dépenses de santé, en partant des besoins de la population pour définir la politique de santé. Je fonderai les modalités d’évolution et de maîtrise de nos dépenses de santé sur des Objectifs Nationaux de Santé Publique (ONSP). Nous donnerons à la prévention et à la promotion de la santé, un rôle nouveau, construit autour d’engagements pluriannuels et de priorités claires qui engagent l’ensemble des acteurs du système de santé.

Ensuite, je l’assume : oui, le service public hospitalier doit redevenir attractif. Quand celui-ci rencontre des difficultés, l’ensemble des acteurs du système de santé sont impactés et ce sont les patients qui en subissent les conséquences. Les établissements de santé seront financés à la hauteur des besoins et leur insertion dans les parcours de soins sera améliorée par le renforcement des coopérations avec le secteur ambulatoire et le médico-social.

Enfin les soins de proximité seront renforcés autour des professionnels des soins primaires, en particulier les médecins généralistes, infirmiers et pharmaciens. L’année de professionnalisation des médecins généralistes dans les déserts médicaux s’intègre dans un dispositif complet que j’appelle « Santé et territoires », par lequel l’Etat et les départements contractualiseront pour réduire les déserts médicaux et augmenter l’offre de soins. 

QUESTION 2 : Quel regard portez-vous sur l’action des 1030 hôpitaux et cliniques privés de France ? Quels place, rôle et missions souhaitez-vous leur donner pour les années à venir ?

Les hôpitaux privés ont toute leur place dans le système de soins. Les coopérations entre le secteur public et les établissements privés sont essentielles pour assurer le niveau meilleur de soins à toute la population. La réflexion sur les missions exercées par les établissements de soins, quel que soit leur statut, sera reprise notamment au regard des enseignements de la pandémie ; l’objectif partagé sera d’améliorer l’offre de soins pour notre population.

QUESTION 3 : Aujourd’hui, le Service Public Hospitalier demeure excluant pour le secteur privé, alors même que les hôpitaux et cliniques privés remplissent les mêmes missions, comme leur action pendant la pandémie l’a illustré. Souhaitez-vous rénover le Service Public Hospitalier afin de réunir les acteurs publics et les acteurs privés autour de missions de service public ? L’équité de traitement entre acteurs de statuts différents est-elle un principe que vous voulez porter et défendre, notamment sur le plan financier selon le principe « un même patient, un même soin, un même tarif » ?

Le système hospitalier public remplit ses missions en développant des partenariats avec les autres acteurs du système de santé, qui permettent de mettre en œuvre des parcours de soins efficaces et adaptés aux besoins des patients.

Par-delà les questions de statut, si notre système de santé ne figure plus aujourd’hui parmi les meilleurs au monde en matière d’espérance de vie en bonne santé, c’est parce qu’il reste trop centré sur le soin. Faute d’avoir suffisamment investi dans la prévention, nous décrochons aujourd’hui vis-à-vis de pays comparables comme la Suède. Je souhaite réunir et mobiliser l’ensemble des acteurs de santé autour des Objectifs Nationaux de Santé Publique, qui seront porteurs de sens pour les professionnels.

Un exemple : je propose d’appliquer cette méthode pour lutter contre le surpoids et l’obésité. C’est aujourd’hui en France 1 adulte sur 2 qui est concerné, et de façon accrue les plus modestes. Chaque année, l’obésité tue 180 000 personnes du fait de maladies comme l’hypertension ou le diabète. Je propose donc de nous fixer collectivement comme objectif de diminuer l’obésité de 20% en 5 ans. Pour obtenir des résultats, nous aurons besoin de toutes les forces vives. Le secteur privé a un rôle à jouer. Nous accompagnerons les acteurs dans ce changement de logique en développant des modèles de financement centrés sur les parcours de soins plutôt que sur des actes.

QUESTION 4 : Les établissements de santé de tous statuts subissent des pénuries fortes de professionnels, notamment paramédicaux. Quelles mesures fortes et concrètes, relatives notamment à la formation, souhaitez-vous prendre pour remédier à cette situation et augmenter le nombre de professionnels, formés, et renforcer l’attractivité des métiers du soin ?

J’augmenterai les capacités de formation dans toutes les filières de santé. Nous formerons jusqu’à 15 000 nouveaux médecins par an. Le nombre de places dans les formations pour devenir infirmier et aide-soignant sera aussi augmenté.

Je soutiendrai l’évolution des métiers et des compétences dans le champ de la santé pour permettre aux professionnels d’évoluer au cours de leur carrière, par exemple dans le cadre des pratiques avancées.

Il nous faudra aussi répondre collectivement à la perte de sens. Tous les professionnels de santé me parlent des décalages qu’ils vivent entre leurs valeurs soignantes et la réalité du terrain. Lorsque j’appelle à tourner la page de l’hôpital-entreprise, c’est avant tout pour remettre en cause un système trop centré sur la maîtrise comptable des dépenses, et redonner du sens au travail des professionnels. Mes priorités seront la qualité des soins et la santé publique, plutôt que la recherche permanente du moindre coût. 

QUESTION 5 : Les enjeux d’accès aux soins figurent parmi les inquiétudes prioritaires des Françaises et des Français. Quelles sont vos propositions pour renforcer l’information des citoyens, l’accessibilité, la continuité et la permanence des soins ? Comment parvenir à renforcer la place du secteur privé dans le déploiement de ces politiques ?

La quatrième année d’internat de médecine générale, prévue par le gouvernement actuel, deviendra une année de professionnalisation comme médecin assistant dans les déserts médicaux. Cette année sera assortie d’un encadrement par des médecins expérimentés, et d’une rémunération, 3500 euros nets par mois, à la hauteur de leurs responsabilités.

Cela s’intègre à un dispositif complet qui ne concernera pas que les médecins généralistes, mais l’ensemble des spécialités d’exercice ambulatoire. Les départements seront chargés d’organiser l’accueil des étudiants et jeunes médecins dans les déserts médicaux, en particulier le logement et les moyens de leur mobilité. L’objectif est qu’ils vivent dans le territoire pour se projeter dans une future installation. L’Etat financera le dispositif à hauteur de 170 millions d’euros par an. Les médecins seront accompagnés tout au long de leur installation.

Enfin, nous généraliserons à l’ensemble du territoire les permanences de soins pour les médecins libéraux. Ce seront les communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) qui auront la mission d’organiser cette obligation.

QUESTION 6 : Dans la perspective d’une menace pandémique persistante, voire de la survenance d’autres crises sanitaires, quelle ligne politique comptez-vous adopter, que ce soit sur le plan de la santé publique ou de la souveraineté économique ? Au-delà, si vous deviez ériger un enjeu de prévention/santé publique/santé environnementale en Grande Cause nationale, quel serait-il ?

On ne peut que se réjouir que les restrictions soient progressivement levées, mais cela ne doit pas nous empêcher de faire le bilan de la gestion de cette crise par le chef de l’Etat, trop centralisée et très solitaire. Avec plus de 130 000 morts, je n’oublie pas le lourd bilan de la pandémie pour les Français. Ce n’est pas à la hauteur d’un grand pays comme la France. Nous ne devons pas être dans la moyenne, nous devons être à la pointe en matière de santé. Présidente de la République, je renforcerai notre système de santé publique. Si une nouvelle épidémie se présente durant mon mandat, j’aurai une gestion plus collective, plus axée sur la prévention, et qui ne fracture pas la société. 

J’œuvrerai aussi à réarmer notre système de santé. La crise a mis en lumière la dépendance des systèmes de soins européens à des produits importés. Cette dépendance est liée à la disponibilité de matières premières et à l’organisation même des processus de production à l’échelle internationale, les industries de santé ayant connu de nombreuses délocalisations. Afin de restaurer notre souveraineté et pour assurer la continuité des prises en charge de nos patients, je demanderai au gouvernement de travailler avec les industriels à des relocalisations ciblées sur la conception et la production de médicaments. 

Ces relocalisations sont aussi un enjeu environnemental. Alors que le secteur de la santé (8% des émissions de CO2) doit réduire ses émissions, suivant la même tendance que l’ensemble de notre économie, il est à noter que plus de la moitié des émissions de ce secteur sont causées par les médicaments et dispositifs médicaux. La production en France devra être plus propre et permettra de diminuer les émissions liées au transport.

 La santé est un secteur d’avenir pour notre pays, elle sera l’objet d’une des 4 odyssées industrielles que je propose. Ce sera un effort historique de notre nation, associant la puissance publique et les acteurs économiques, pour réindustrialiser une filière, l’aider à innover et à former le capital humain si crucial face à la concurrence internationale. Cet effort de notre pays sera porteur de progrès pour tous : je propose ainsi de nous fixer pour objectif de vaincre les maladies neurodégénératives à horizon 2035. 

Enfin je ferai de la santé mentale, trop longtemps négligée dans notre pays, la grande cause de mon quinquennat. Notre système de santé en psychiatrie se trouve dans une situation catastrophique alors que les besoins sont immenses. Un chiffre en témoigne : les troubles psychiques concernent plus d’un Français sur cinq. Je proposerai au Parlement une loi-cadre de programmation pluriannuelle pour définir les objectifs à atteindre et les moyens à mettre en œuvre pour y parvenir, accompagnés d’évaluations de ces actions.

QUESTION 7 : La qualité et la pertinence constituent-elles pour vous des leviers essentiels pour la transformation du système de santé ? Quelles modalités pour inscrire davantage la qualité et la pertinence au cœur des pratiques et des organisations (financement, contractualisation…) ?

Je suis favorable à ce que la qualité des soins et la pertinence des soins et des actes deviennent un axe de régulation du système de santé. Ce sujet doit être enfin investi et travaillé avec et par les acteurs du système de santé au bénéfice des patients.

QUESTION 8 : Le secteur de la santé s’est engagé dans un virage numérique qui amorce une refonte profonde du système de santé, impactant les organisations mais surtout en le tournant vers un citoyen-patient acteur de son parcours de soins. Quel doit être l’objectif premier poursuivi par ce virage ? Quels sont vos propositions en la matière comme vos points de vigilance ?

Le numérique est un axe majeur d’évolution et de progrès pour notre système de santé mais ce virage ne doit pas être pris au détriment des plus fragiles. Je n’ignore pas que 17% des Français souffrent d’illectronisme.

Alors que les inégalités de santé sont déjà si fortes dans notre pays, il serait dramatique que le numérique contribue à les augmenter. Pour cela, il faudra que le temps gagné par les professionnels grâce au numérique, pour soigner les patients qui sont à l’aise avec ses outils, soit redéployé pour consacrer plus de temps et aller vers les personnes les plus éloignées du système de soin.

Je suis aussi attentive aux enjeux de sécurité des données car c’est une des conditions pour que les patients utilisent ces nouveaux outils. Nous avons vu pendant la pandémie, avec la vaccination, qu’une partie de la population pouvait perdre confiance dans les professionnels de santé et les messages des autorités. La confiance dans le numérique sera là si nous développons les nouveaux outils avec les usagers eux-mêmes et en apportant toutes les garanties en matière de sécurité. Le pays doit être à la pointe en la matière, nous avons le savoir-faire nécessaire dans nos entreprises et nos start-ups.

QUESTION 9 : Avez-vous l’intention de réformer la gouvernance et le pilotage du système de santé, et quelles grandes orientations privilégiez-vous pour le faire : contours et rôle du ministère de la santé et de ses directions, rôle des ARS, décloisonnement des acteurs, déconcentration/décentralisation, enjeux des données de santé, place de la démocratie sanitaire, pluriannualité des ressources…

Nous sortirons du p ilotage par la maîtrise comptable des dépenses qu’incarne l’ONDAM. Je proposerai de fonder l’évolution des dépenses de santé sur les Objectifs Nationaux de Santé Publique. Ceux-ci seront débattus au Parlement au premier semestre, à la suite d’un travail territorialisé au niveau des départements sur les besoins de santé, et précédant ainsi les lois de financement de la sécurité sociale.

La santé est l’affaire de tous : j’associerai les acteurs de santé, les collectivités territoriales, et les représentants des usagers et des citoyens à la définition des besoins. 20 ans après la loi Kouchner, un nouveau départ s’impose pour notre démocratie sanitaire.

Nous renforcerons en priorité l’échelon départemental. Je reconnaitrai le rôle des départements en tant qu’acteurs de soins de proximité, notamment dans la lutte contre les déserts médicaux.

QUESTION 10 : En votre qualité de candidate/candidat à l’élection présidentielle, quel message souhaitez-vous délivrer aujourd’hui aux femmes et aux hommes de l’hospitalisation privée ?

La santé mérite mieux que des guerres de chapelle. Elle est, avec l’école, une des deux priorités de ma campagne présidentielle. Je suis déterminée à réformer en profondeur notre système de santé car je n’ai qu’une ambition pour mon pays : que dans cette période troublée, il retrouve le chemin du progrès.

Les candidat.e.s déclaré.e.s au 7 mars 2022

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